Destan est un homme distant. Il est renfermé, ne se mêlant jamais aux autres individus. Et ce n’est certes pas à cause de la timidité, non. Son mal est plus profond, les raisons de ses agissements sont ancrées en lui depuis bien longtemps. Sa vie était normale jusqu’à cette période néfaste ou il a été détruit. A partir de ce moment, son âme a commencée à devenir terne, puis noire et enfin, si obscure qu’il n’en voyait plus le bout. Sa nature, son changement, son isolement, tout ça l’avait pesé, tout ça l’avait rendu aussi taciturne que solitaire. S’attacher aux gens ? Il ne le voulait plus. Cela ne servait à rien. Les gens faisaient tout pour vous détruire. Il ne compte que sur lui-même et se moque de ce que les autres pensent. Il vexe sans avoir d’état d’âme, éloigne ceux qui tentent de le comprendre. Et surtout, personne ne le touche. Le contact lui donne froid dans le dos et il a déjà tué pour ça. Quand il y a quelque chose à soigner ? Il préfère le faire lui-même plutôt que laisser un guérisseur poser ses sales pattes sur lui.

Destan est un homme charmant. Quand on le regarde de loin, très loin. Mais en s’approchant plus, en contemplant son visage carré aux traits durs et distants, on n’a qu’une envie, c’est de fuir. Son nez droit mets en valeur ses lèvres qui ne forment plus de sourire. Et surtout, ses yeux sont connus de tous. Il a des yeux gris pâles qui le font souffrir s'il reste trop au soleil sans protection. Les flammes de l’enfer sont imaginables avec ses cheveux. Des cheveux châtains ornés de nombreuses mèches rouges. Des cheveux mi-longs, qui lui tombent sur le front élégamment. On aurait pu le trouver beau, sauf que son âme est bien trop noire pour qu’on voie sa beauté…
Notre homme est de taille standard, un mètre soixante-quinze, avec un poids normal. Il mange peu aussi. Les nombreux entraînements qu’il a subit lui ont conféré une musculature digne des plus grands. Personne n’ose le défier, et pas seulement à cause de son caractère ou son statut. Non, il se bat parfaitement bien.

Tout le monde se demande souvent pourquoi ce Mercenaire a une aussi mauvaise réputation. On le dit colérique et froid. Ce qui est exact. Mais personne, oh non personne, ne sait pourquoi. Cela remonte à son enfance…

Destan était un petit garçon d’une dizaine d’années, débordant de vie. Un enfant normal, entouré de ses proches. Son père était fier de lui et des progrès qu’il faisait. Il était veuf, malheureusement. Sa femme, la mère de Destan, était décédée dans les jeunes années de son fils, foudroyée par une maladie qui avait décimée la majeure partie de la population.
La perte avait été lourde à accepter et les cicatrices jamais complètement refermées. Destan était alors devenu un peu plus renfermé et son père avait bien failli sombrer dans l’alcool.
Mais ensemble, ils surmontèrent, et purent vivre quelques années en paix, jusqu’à ce qu’une nouvelle femme entre dans la vie de son père, forgeron.

Cette femme devint la belle-mère de Destan qui ne l’acceptait pas, même s’il se montrait courtois et polit en sa présence. Pour lui, c’était trahir sa mère que de reprendre une femme. Mais au moins, son père souriait à nouveau comme avant. Alors il ne disait rien et restait sage comme une image. La belle-mère elle, était sournoise malgré son sourire charmeur et ses phrases semblables à des volutes de fumée. Elle avait des vues sur l’enfant. Enfant de onze ans, dans la fleur de l’âge, très beau déjà. Destan avait hérité des traits de sa défunte mère, réguliers et finement tracés. Mais ce qui la fascinait le plus était sans conteste ses yeux. Il avait de magnifiques yeux gris pâles.

C’est un soir que tout bascula. Destan était dans son lit, voulant s’endormir, quand sa belle-mère entra. Il ne comprit pas, bien sûr. Elle ferma à clé et n’alluma qu’une petite bougie qu’elle laissa loin de la porte pour que la lumière ne se voie pas par-dessous.
Destan s’était rassis, fronçant les sourcils, et elle vint s’asseoir à côté, sa main se posant sur ses jambes dissimulées par les draps. Elle commença à lui parler, à lui dire qu’il était très beau. Qu’elle pouvait lui faire connaître un plaisir que jamais il ne connaîtrait ailleurs. Mais que pour ça il ne devait rien dire à son père ni à personne et qu’il devait obéir à tout ce qu’elle lui dirait de faire.

Bien sûr, le petit garçon voulut savoir quoi comme plaisir, mais la femme ne fit qu’un sourire en lui répondant qu’il saurait seulement s’il acceptait. Il ne savait pas. Alors elle décida à sa place. Elle commença à le toucher,  même à lui enlever son pyjama. Le petit avait peur. Il voulait pleurer, crier et appeler son père. Elle lui ordonna de se taire, si brusquement qu’il obéit. Il pleura, mais en silence, la laissant faire.
Le calvaire avait débuté, et continua jusqu’à ses vingt ans. Jusqu’à la mort de son père.

Destan n’eut plus aucune maîtrise sur sa vie. Sa belle-mère choisissait tout pour lui, prenait les décisions. C’est elle qui décida de l’école qu’il fréquenterait à l’adolescence. Elle qui décidait ce qu’il portait, mangeait, achetait. Elle lui interdit d’avoir un quelconque ami et de ne faire confiance à personne. Et durant sa puberté, avec les hormones, elle profita de pouvoir abuser de lui quand elle voulait. Surtout qu’à présent qu’il était grand, elle se lâchait et le griffait, le mordait, l’attachait, et lui faisait faire toutes sortes de choses affreuses qui le hantaient les rares fois où il dormait sans qu’elle ne vienne.

Il ne souriait plus, ne parlait presque plus, devenait distant et froid. Son père dépérissait, malheureux en mariage avec la belle-mère mais coincé, sans pouvoir la quitter. Destan observait son père mourir, sans savoir quoi faire pour l’aider.
Quand il mourut, il fut seul, son fils étant en train de faire plaisir à sa femme, sous la contrainte.
Le lendemain, quand Destan, éreinté et meurtri, trouva son père, il s’effondra. Et il prit la première décision en dix ans. C’était finit. Il n’en pouvait plus.

Ils enterrèrent le forgeron convenablement. Comme son père l’avait décidé, Destan était son héritier et toutes ses possessions et richesses lui revenaient, ce qui se totalisait à la forge, une grande maison, des armes, et toutes les économies qu'il avait.
Assis dans le grand fauteuil de son père, la boule au ventre, il prit la seconde décision importante : il ordonna à sa belle-mère de fuir avant qu’il ne lance les chiens sur elle pour l’éventrer. Celle-ci ne se fit pas prier, mais Destan n’oubliera jamais son regard prometteur d’un retour vengeur.

A partir de là, et jusqu’à ce jour, Destan resta loin des gens. Il avait continué à la forge, mais voulait aussi asseoir son autorité. Il avait alors embranché sur la voie des Mercenaires. Les contrats qu'il recevait étaient toujours fait vite et bien, et l'argent était mis de côté. La grande maison avait été refaite, et il avait pris du personnel à sa charge. Les domestiques étaient traités comme des esclaves et il s’en fichait de leur état. Il prenait lui-même ses décisions, et si quelqu’un osait le faire pour lui, cette personne se retrouvait six pieds sous terre. A Aetarh, qu’importait ce qu’il faisait. Il vivait un peu loin de la ville principale. Il faisait ce qu’il voulait. Il contrôlait tout. Il contrôlait les tâches des domestiques, contrôlait les repas, les contrats. Il voulait toujours tout savoir, tout prévoir. Et surtout, il aimait à battre les femmes. Les rares qu’il prit lui rappelaient tant sa belle-mère qu’il se vengeait sur elles. Il avait même faillit en violer une, mais c’était ravisé à la dernière seconde, se revoyant à la place de la femme qui pleurait sous lui.

Il la laissa partir, et décida de ne plus coucher avec une femme. Ce dérapage lui avait fait comme une gifle et son passé l’empêchait de continuer sur cette voie.
Il restait juste distant, personne ne le touchait, personne ne prenait de décisions pour lui.

Tout le monde lui obéissait. Destan était une sorte de despote, de tyran, sans foi, sans cœur. Il n’avait plus de cœur. On le lui avait arraché. Pour lui, les ténèbres étaient son passé, son présent et son futur. Il était au bas de l’échelle, et il ne souhaitait pas remonter.

Cependant un jour, une des femmes qui le servait mourut. Sous les coups ou d'autre chose, il ne voulait guère le savoir. L'un de ses hommes, qui lui cherchait les contrats juteux, lui souffla qu'il fallait la remplacer. C'était apparemment elle qui s'occupait des repas. Il mit une semaine avant de se décider à aller fouiner les auberges mais avant de partir, il restait seul dans sa chambre, dans le noir et il frappait ce qu’il voyait, hurlait, et restait en boule, comme un cocon.

Il avait vingt-six ans. Avait l’aspect et l’attitude d’un adulte sans cœur. Alors qu’au fin fond de lui se terrait l’enfant de onze ans détruit par sa belle-mère et qui ne demandait qu’à sortir pour rattraper ce temps gâché.

Un enfant qui sommeillait, attendant qu’une main l’aide à remonter à la surface.

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Un petit commentaire: Nop’ j’aime bien ce forum :Pah si ! ceci est un DC !
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